
Les banques françaises se veulent rassurantes. Elle ne seront pas durement touchées par l'effondrement de la plus petite banque d'affaires américaine Lehman Brothers. Elles assurent avoir peu prêté à l'établissement financier américain, dont la dette atteint 613 milliards de dollars.
BNP-Paribas, l'une des banques qui ont jusqu'ici le mieux résisté aux séismes financiers provoqués par la crise des subprimes, les crédits immobiliers américains à risques revendus à travers le monde sous forme de titres, a indiqué que son exposition était "gérable" pour une banque de son envergure, sans la chiffrer. Un document remis par Lehman Brothers aux autorités judiciaires américaines mentionne cependant un prêt de 250 millions de dollars de la banque française, parmi les plus importants qui lui ont été consentis.
La banque d'affaires Natixis, filiale des groupes Banque Populaire et Caisse d'Épargne, a chiffré à 109 millions d'euros le montant de ses engagements à risque. Elle détient une autre créance de 267 millions d'euros mais celle-ci est garantie par des actifs que Lehman lui a apportés en gage et qui la protègent en cas de défaillance de la banque américaine.
Crédit Agricole S.A. a indiqué mardi soir que le cas Lehman pourrait lui coûter jusqu'à 270 millions d'euros, dont moins de 20 millions d'euros en créances.
Plus exposé, l'assureur Axa détient 300 millions d'euros de créances vis-à-vis de la banque d'affaires américaine. "Certains articles de presse citant récemment des détentions plus importantes d'actions ordinaires de Lehman Brothers et d'AIG font référence à des actifs investis pour compte de tiers, essentiellement gérés par la filiale de gestion d'actifs AllianceBernstein, détenue à 63 % par le Groupe Axa", précise l'assureur. Dans un document remis aux autorités judiciaires américaines, Lehman Brothers affirmait pourtant qu'Axa et ses filiales détenaient 7,25 % de son capital. "Ces actifs ne sont donc pas détenus en propre par le groupe Axa", rétorque-t-il. Par ailleurs, Axa affirme détenir "environ 0,02 % du total des actions ordinaires d'AIG", le premier assureur américain, sauvé du dépôt de bilan par la FED.
L'établissement franco-belge Dexia a révélé que le montant de son exposition non gagée s'élevait à 500 millions d'euros. Ses autres engagements, qui sont garantis par le même mécanisme que Natixis, s'élèvent à 1,8 milliard d'euros. Le Crédit Mutuel affirme n'avoir "aucune exposition directe". Quant au Crédit Agricole SA, il ne communique pas de chiffres mais parle d'une "exposition très limitée et couverte". La Société Générale, durement touchée par les pertes liées au débouclage des positions inconsidérées du trader Jérôme Kerviel, n'a donné à ce stade aucune indication sur son exposition.
Le groupe Caisse d'Epargne possède des créances de 50 à 60 millions d'euros, a indiqué son directeur général, Nicolas Mérindol mardi, sur France Info. Le groupe Banque Populaire n'a pas souhaité communiquer de chiffre. De son côté, le Crédit Mutuel affirme n'avoir "aucune exposition directe". Quant à l a Société Générale , elle n'a donné à ce stade aucune indication sur son exposition.
Un renchérissement du crédit
Le directeur général du Fonds monétaire international, le Français Dominique Strauss-Kahn, se veut plutôt rassurant sur l'exposition des établissements européens à la crise : "Le fait qu'un certain nombre de banques aux États-Unis soient en train de se restructurer ne doit pas faire céder à la panique", a-t-il déclaré au Caire. S'il prédit "un secteur financier mondial beaucoup plus étroit", le patron du FMI considère aussi que les banques européennes, qui marient plusieurs métiers, seront finalement "moins touchées", et ne risquent pas d'être "mises par terre" comme leurs consoeurs américaines. Évoquant des banques françaises, comme BNP-Paribas, qui ont déjà fait état de leur exposition, il souligne qu'il était "peu concevable qu'il en soit autrement, puisque la plupart des banques européennes portaient une partie des titres d'établissements américains sous des formes diverses" et n'étaient pas directement menacées.
Ce qui est néanmoins sûr, c'est que la débâcle de la banque américaine Lehman Brothers va entraîner un renchérissement du crédit dans les semaines qui viennent. La ministre de l'Économie Christine Lagarde l'a admis mardi. Selon elle, la restructuration des institutions financières américaines, "c'est véritablement un bouleversement dans le paysage financier international (...) Cela va forcément entraîner des conséquences, ne serait-ce que sur, par exemple, des tensions" sur le niveau des taux d'intérêt "qui vont amener un renchérissement du crédit dans les semaines qui viennent". "C'est un effet indirect immédiat, mais il y en aura d'autres", prévient-elle.
"Heureusement les banques françaises sont relativement peu affectées" par les difficultés de Lehman Brothers, s'est-elle néanmoins félicitée. Elles ont une exposition directe au risque Lehman faible par rapport à ce qui est observé dans d'autres pays (...) D'autres établissements ailleurs en Europe vont être considérablement plus affectés, a-t-elle jugé. "À Londres, c'est au moins 4.000 personnes dans le secteur bancaire qui seront privées d'emplois immédiatement, dans des délais très rapides."
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